Entre prévoir et imaginer
Pluie Noire a fait remonter à la surface une phrase (qui n’en était jamais restée éloignée, toutefois, depuis que je l’ai lue il y a bientôt dix ans, et que n’ai au fond jamais cessé de méditer) : « Ils [les Japonais pendant la guerre] ne cessaient de répéter que sécurité et moral tenaient seulement au fait d’être prévenus. Quelle que fût la catastrophe, (…) le mot d’ordre était que tout avait été prévu et qu’il n’y avait donc pas de souci à se faire (Ruth Benedict, Le Chrysanthème et le Sabre).
Or : « Jamais nous n’avions entendu dire, jamais nous n’aurions imaginé qu’une bombe si terrible existât en ce monde », dit Ibuse.
L’impuissance – la défaite de l’imagination : voilà peut-être une des clefs de ce qui me touche autant, dans Hiroshima.
Et ce reproche aussi s’enrichit d’autres sens, qui me le font comprendre différemment :
« Tu n’as rien vu à Hiroshima ».